j'ai besoin de toi comme d'une infirmière

Doucereuse, elle tangue
Les plantes-plastique hantent les couloirs,
Ophélia glisse une main dans ses cheveux,
Un comateux, une larme d’espoir.
Ils grisonnent, elle pense en les peignant.
Ce serait une perte, une perte de ne plus vous avoir.
Ophélia est un oiseau de proie sorti du nid,
Elle ne tient pas bien sur ses guiboles quand elle sourit.
Grande, fière, elle voudrait être tout ça, disparaître.
Ses propres rêveries, un sarcophage où elle couvre sa peau,
De poussière en poussière elle n’en voit plus la fin.
Faible nature, elle déambule, un bateau ivre qui s’agrippe. 
Les derniers bouts de vie sont comme les dernières gouttes.
La solution saline s’échappe et, petit à petit,
Son souffle qui câline de loin une amie apeurée,
Telle qu’Ophélia.
Son souffle fond contre les machines,
Il les dévore, graduellement. 
Il ne veut plus,
Plus respirer,
Plus rien.

…Le silence est venu s’asseoir à côté, il s’est appuyé contre elle, elle n’a pas bougé, seulement laissé des mains nerveuses aller et venir contre son habit de travail. Le silence a commencé à jouer avec ses cheveux, et alors elle n’était plus toute seule; elle a commencé à entendre que ça n’allait pas, qu’il lui fallait du temps. Elle est restée assise là, à contempler un dernier morceau de vie étalé sur un drap à se dire que quelque chose clochait avec elle, ne sachant simplement pas quoi. Le silence lui murmure que ce n’est pas grave, qu’on est tous un peu comme ça avec des fêlures sur les os, et le crâne comme une cavité, avec quelques bouts de lumière imbibés d’attente, imperturbables et perturbés. C’est ce que nous sommes à cet âge.