pétales

t'as pas eu le temps de vivre, umeko. les soirées sous les cerisiers, en bicyclette, ou à pieds. ivre umeshu ou ivre bonheur, ou les deux. les / le coups de foudre, les baisés mouillés sous la pluie, les caresses rugueuse sur ta peau soie. t'as été transférée tout de suite. tout s'est transformé trop vite. le grand frère, il a pas pu te suivre, pas tout de suite, pas comme ça. réapprendre à vivre. continuer de bourgeonner ou se laisser faner. t'as décidé de choisir la vie, même si elle, t'as oubliée, punie de respirer. ça s'est passé si vite, comme ont voit dans les films, comme le décrivent les accidentés de la route, comme ont s'essouffle, aussi, dans ton cas. tu recevais des lettres du grand frère parfois, dans ta chambre trop blanche, trop hospitalisée. et puis un an, quatre jours et une nuit après, t'as craquée. comme ont arrache une branche d'un arbre. le blanc, il était trop présent, il t’éteignait, t'empêchait d'éclore. tu l'as tapissé jours après jours, nuits après nuits, quand t'étais dans un bon jour, quand tu le pouvais, pas quand tu le voulais, jamais. tapissé japon, tapissé couleur. les choses qui font que tu es umeko dispersés sur les murs, des photos du grand frères, celles qu'il t'envoi parfois. branches de cerisiers peintes mains, des étoiles suspendues ficelles au dessus de ton lit. tu t'es fait chez toi, l'hôpital, c'est ta dernière maison, ta dernière famille, tes dernières années de vie. et ta vie, tu veux la vivre, tu veux voir le soleil se coucher, même si tu dois escalader l’Himalaya, les poumons comme si t'avais respirer du verre, pour le voir. tu veux aimer, même si c'est entre ces murs blancs néant, même si c'est en respirant les effluves antiseptique. tu veux vivre. maladroitement, pleinement, difficilement, vivre.

T'avais onze ans, l'hémoglobine entre les lèvres et les larmes rosées sur ta peau pétale. Les poumons en feu de brindilles et les paroles éteintes. T'avais onze ans, quand le grand frère à crocheter sa première serrure, volé sa première voiture, amoncellement de métal rouillé sur roues. T'avais onze ans, l'coeur en floraison au bords des lèvres rougies par le sang craché étouffements. T'avais onze ans, quand le grand frère a porté ton corps trop petit pour la toux sanguine et les spasmes de tes membres fous, quand le grand frère t'as posé à l'arrière de sa première voiture méfaits, peinture bleue écaillées.

Diagnostic ; lymphangioléiomyomatose

Cette pathologie se caractérise par une prolifération d'un certain type de cellules musculaires lisses qui entraîne la formation de kystes dans les poumons, avec à terme une insuffisance respiratoire.

Comme le ciel qui tombe sur les épaules du grand frère, comme la mort qui te colle à la peau, comme des fleurs, des cerisiers qui émergent de tes poumons, qui les asphyxie à coups de bourgeons. L'hôpital qui devient plus une maison qu'un lieu médical.